La France est-elle en train d’assister à la fin du modèle économique des fournisseurs alternatifs, implanté sur le marché de l’énergie depuis les années 2000 ? C’est en tout cas ce qu’il semblerait. Avec la hausse globale de prix de l’énergie, ce n’était qu’une question de temps avant qu’un fournisseur d’électricité doive mettre la clé sous la porte. Il s’avère que c’est Hydroption, fournisseur pour professionnels et entreprises qui va, le premier, en faire les frais. Avec un bilan et une économie extrêmement fragilisés par l’état actuel du marché de l’énergie, le fournisseur a reçu une notification préalable de son retrait de licence de fournisseur. Une nouvelle qui sème le doute et la discorde auprès de ses plus gros clients, parmi lesquels figurent notamment la ville de Paris, ainsi que l’armée française.
Hydroption en redressement judiciaire : quel avenir pour ses clients actuels ?
Alors que la crise du gaz entre l’Europe et la Biélorussie risque encore de faire augmenter les prix de l’énergie, la France assiste aux premières conséquences de la flambée des prix de l’électricité. Placé en redressement judiciaire depuis octobre, Hydroption semble maintenant au bord du gouffre. Pour cause : le fournisseur d’électricité spécialisé dans la distribution aux entreprises et aux professionnels s’est vu adresser, mercredi, une notification préalable au retrait de son autorisation d’exercer. Cette notification émane directement de la DGEC, la direction générale de l’énergie et du climat.
Hydroption va-t-il alors devenir le premier fournisseur électrique sans autorisation de fournir de l’électricité ? Cela semble, en tout cas, bien parti pour. Conscient de l’épée de Damoclès qui plane au-dessus de son activité, le fournisseur d’électricité cherche à présent un repreneur, prêt à investir dans la société. Une nouvelle peu encourageante pour tous ses clients. Parmi les 18 500 sites dépendant de l’électricité d’Hydroption, on retrouve notamment plusieurs mastodontes : la ville de Paris, l’armée française ainsi que les ministères et les établissements publics de l’Etat, que le fournisseur devait fournir en énergie renouvelable jusqu’en 2023 à hauteur de 3 TWh.
Heureusement, il semblerait que tous ces contrats, d’une valeur de plusieurs centaines de millions d’euros, aient tous été résiliés à temps. Un coup dur pour de nombreux professionnels et secteurs industriels, qui vont rapidement devoir se tourner vers un nouveau fournisseur. Selon des déclarations officielles, le Ministère aurait, malgré tout, déjà trouvé des fournisseurs de secours pour remédier à la fermeture hypothétique d’Hydorption. En tout et pour tout, le volume total d’énergie délivré par Hydroption en 2020 s’élevait à plus de 13 TWh, un chiffre faramineux. Ce n’est donc pas un petit fournisseur peu implanté sur le marché qui tombe sous les coups (et les coûts) de la hausse des prix de l’énergie.
Les conséquences de la faillite d’Hydroption :
- plusieurs centaines de millions d’euros de contrats de fourniture ;
- plus de 18 500 sites ;
- trois contrats avec l’Etat Français perdu ;
- le premier fournisseur à subir la hausse des prix de l’énergie.
Mauvaise gestion de l’énergie et bourse européenne de l’électricité : les raisons de la banqueroute
Mais comment exactement la hausse des prix de l’énergie a-t-elle pu mettre tout un fournisseur d’énergie sur le carreau ? Les prix pratiqués n’affectent-ils pas uniquement les consommateurs ? Il s’avère, en vérité, que l’électricité en Europe fonctionne sur le même modèle que la bourse. Les fournisseurs achètent donc de l’énergie sur le marché européen de l’énergie, pour ensuite la revendre à leurs clients. Un mauvais investissement, une mauvaise gestion ou un mauvais placement peuvent se révéler dramatiques. C’est ainsi qu’en octobre, EDF Trading perdait plus de 400 millions d’euros en raison de spéculations hasardeuses sur le marché européen de l’énergie.
Le marché de l’énergie repose en grande partie sur les prix pratiqués par la bourse européenne de l’électricité.
La hausse des prix de l’énergie influence donc également les prix de d’achat de l’énergie sur cette plateforme. Des dires du PDG d’Hydroption, Michel Kerever, cette instabilité financière découlerait alors d’une mauvaise gestion de l’énergie via la bourse européenne. Hydroption aurait drastiquement réduit ses achats en énergie sur le long terme durant la crise de la Covid-19, sans anticiper la reprise. Lors de la hausse de consommation, ils ont alors été force de se fournir en énergie sur les marchés à court terme, subissant alors des prix trop élevés, menant à une instabilité financière.
L’activité de fournisseur alternatif, apparue avec l’ouverture du marché de l’énergie à la concurrence, comporte donc de nombreux risques financiers, en grande partie liés à la bourse de l’énergie. Avec l’état actuel du marché de l’énergie et la flambée des prix, d’autres fournisseurs alternatifs risquent bien de tomber dans les mêmes écueils. Ils sont déjà nombreux à ne plus accepter de clients depuis plusieurs mois, de peur de ne pas réussir à assurer une fourniture d’énergie comportant trop de frais. De nouveaux cas similaires risquent alors d’émerger, notamment pour tous les fournisseurs n’ayant pas correctement anticipé la hausse des prix et de la consommation, se retrouvant alors forcé d’acheter à pertes.
Quels antécédents au cas d’Hydroption ?
- Le prix de l’énergie sur le marché de gros.
- Le fonctionnement de la bourse européenne de l’électricité.
- La crise du COvid-19 et la reprise rapide de consommation.
- Une mauvaise anticipation des coûts liés à la fourniture.
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